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Potentiel d'oxydoréduction

Potentiel

On aura noté sur le tableau des couples oxydoréducteurs une troisième colonne contenant des chiffres. L'en-tête de cette colonne indique que ces valeurs sont des volts - l'unité de potentiel électrique. Dans le tableau, les valeurs les plus positives se trouvent vers le haut, les valeurs les plus négatives se trouvent vers le bas. On dit que plus la différence en potentiel entre deux couples oxydoréducteurs est grande, plus la réaction entre eux est rapide.

Vérifions cela avec trois réactions que nous connaissons déjà : la réaction entre l'acide d'une part, et le magnésium, l'aluminium et le cuivre d'autre part. On sait d'expérience qu'une réaction se produit avec les deux premiers métaux mais pas avec le troisième. Voyons ce que la théorie peut en dire.

Une première chose à se rappeler est qu'un acide donne des cations d'hydrogène. On va donc chercher dans le tableau le couple qui contient ces cations. On trouve le couple 2 H+ + 2 e- / H2. On fait de même avec les trois métaux et on suit la procédure décrite dans la page précédente.

Demi-équation 1 : 2 H+ + 2 e- / H2

Demi- équation 2 : Mg (s) / Mg2+ + 2 e-

Demi-équation 1 : 2 H+ + 2 e- / H2

Demi- équation 2 : Al (s) / Al3+ + 3 e-

Demi-équation 1 : 2 H+ + 2 e- / H2

Demi- équation 2 : Cu (s) / Cu2+ + 2 e-

Différence de potentiel ΔE = Eoxy - Ered

0 - (-2.37) = 2.37 V

0 - (-1.66) = 1.66 V

0 - 0.34 = -0.34 V

Potentiel très positif → réaction spontanée et rapide

Potentiel positif → réaction spontanée

Potentiel négatif→ réaction impossible

Equilibrer si besoin :

2 H+ + 2 e- / H2

 Mg (s) / Mg2+ + 2 e-

6 H+ + 6 e- /3 H2

2 Al (s) / 2 Al3+ + 6 e-

Pas de réaction

Réaction 2 H+ + 2 e-+ Mg (s) → Mg2+ + 2 e- +  H2 6 H+ + 6 e-+ 2 Al (s)2 Al3+ + 6 e- + 3 H2
Final 2 H+ + Mg (s) → Mg2+ +  H2 6 H+ + 2 Al (s)2 Al3+ + 3 H2
Avec l'acide complet : 2 HCl + Mg (s) → Mg2+ +  H2 6 HCl + 2 Al (s)2 Al3+ + 3 H2

On peut confirmer avec l'expérience : plus la différence en potentiel entre les couples oxydoréducteurs est grande et positive, plus la réaction est spontanée et rapide.

La pile de Daniell

Parler de potentiel ou de différence de potentiel en chimie peut semble étrange : on parlait de composés ioniques, de métaux et de solution, et tout à coup on parle de volts. On mélange chimie et électricité, deux domaines qu'on a l'habitude de traiter séparément.

Pile de Danielle non-fonctionnelleTout d'abord, voyons d'où viennent ces valeurs dans le tableau en créant une pile de Daniell.

Tout d'abord, nous avons constaté que lorsqu'on plonge une pièce de zinc Zn(s) dans une solution contenant des ions de cuivre Cu2+, des électrons partent des atomes de zinc pour être pris par les ions de cuivre. Si le soluté contenant les ions de cuivre est du CuSO4, on peut simplifier l'équation de réaction :

Oxydoréduction mangésium / cuivre

Cu SO_4 + Zn(s) \rightarrow Zn SO_4 + Cu(s)

Supposons maintenant que nous fassions en sorte que les électrons empruntent un chemin déterminé par nous. On connecte le fil de zinc à l'aide d'un câble à une solution contenant les ions de cuivre. Ainsi, les électrons passent par le fil. Bien sûr, les ions de zinc produits doivent avoir un endroit où aller : nous plongeons donc le fil de zinc dans une solution contenant des ions de zinc (par exemple, du ZnSO4). Les ions de cuivre doivent aussi avoir un endroit où aller une fois qu'ils ont récupéré des électrons : c'est donc avec un fil de cuivre que nous connectons les deux solutions.

Le fil de zinc et le fil de cuivre sont des électrodes - des pièces conductives qui permettent l'échange d'électrons avec une solution. Bien sûr, cela n'a pas besoin d'être des fils. En fait, il serait souhaitable d''utiliser des pièces qui ont la plus grande surface possible pour faciliter les échanges.

Une fois l'expérience préparée, on constate que rien ne marche : les électrons ne vont pas du zinc à la solution de sulfate de cuivre. C'est en fait normal : si un électron part du zinc, un cation de zinc Zn2+ se retrouve en solution. La solution devient donc positive et attire à elle les électrons. Difficile de laisser partir quelque chose qu'on attire ! De plus, si des électrons arrivaient tout de même à la solution de sulfate de cuivre, les cations de cuivre devenant neutres laisseraient derrière eux des anions de sulfate SO42-. La solution deviendrait négative et repousserait les électrons. Difficile d'attirer quelque chose qu'on repousse !

Pile de Daniell avec pont salinLe problème résidant dans les solutions qui deviennent négatives ou positives, la solution est de les connecter. Ainsi, tandis que le fil permet d'échanger des électrons, un pont salin (ou pont électrolytique) permet d'échanger des ions. En général, une pile de Daniell utilise une solution de nitrate de potassium K NO3.

On peut maintenant décrire ce qui se passe dans une pile de Daniell - et en profiter pour introduire d'autres termes :

Une paire d'électrons quitte un atome de zinc, passe par le fil conducteur et l'électrode en cuivre pour être pris par un ion de cuivre en solution. L'ion de cuivre devient neutre et se dépose sur l'électrode en cuivre. On appelle cette électrode la cathode, parce qu'elle attire les électrons (elle est donc positive, comme un cation). L'électrode en magnésium s'appelle ici l'anode, car elle repousse les électrons (elle est donc négative, comme les anions).

La solution de CuSO4 devient négative, tandis que celle de MgSO4 est devenue positive. Les ions de SO42- sont donc attirés par la solution positive et empruntent le pont salin. Les solutions deviennent donc neutres, et l'échange d'électrons peut continuer.

Maintenant qu'on a un flux d'électrons dans un fil conducteur, on peut effectuer des mesures.

Mesure du potentiel d'oxydoréduction

Lorsqu'on utilise un voltmètre sur les deux électrodes d'une pile de Daniell, on obtient une tension - toujours la même, quelle que soit la taille des électrodes. Le courant peut varier (plus ou moins d'électrons peuvent faire le voyage en même temps), mais la tension ne varie pas.

La tension est un autre nom pour une différence de potentiel ΔE. Physiquement parlant, cette différence est assimilable à l'énergie qu'une charge pourrait acquérir en passant d'une électrode à l'autre. Plus la différence de potentiel est grande, plus un électron peut acquérir de l'énergie cinétique, et plus un courant électrique, un nombre de charges par seconde, est grand.

Différence de potentielSi les électrodes sont en cuivre et zinc respectivement, ΔE est égal à 1,1 V. Si on échange la cathode en zinc pour du magnésium, la tension atteint 2.7 V. L'illustration ci-contre donne d'autres exemples (échelle 1 cm = 1 V).

Il serait pratique d'organiser ces électrodes non pas en termes de différences de potentiel, mais en termes de potentiel tout court.

Pour cela, on a crée une électrode de référence, l'électrode normale à hydrogène ou ENH. Il s'agit d'une électrode en platine plongée dans une solution acide à 1 M en présence de dihydrogène sous forme de gaz. La réaction d'oxydoréduction à cette électrode  concerne donc le couple 2 H+ + 2 e- / H2, dont le potentiel est fixé à zéro.

Tous les autres couples oxydoréducteurs sont donc mesurés par rapport à cette électrode de référence. C'est ce qui nous donne le tableau des couples oxydoréducteurs que nous pouvons utiliser maintenant non seulement pour prévoir des réactions, mais aussi nous permet de créer des piles électrochimiques - des piles ou des batteries.